jeudi 7 avril 2011

Une histoire de Pinoche le dragon

Je travaille dans cette classe une journée par semaine.


Les activités de conscience phonologique occupent une place importante dans les classes de maternelle de mon école. Dans ma classe, j’ai de vrais petits auteurs. Des élèves qui aiment bricoler et dessiner dans les jeux libres, mais de plus en plus, des élèves qui adorent créer des livres. Ils nous dictent leur histoire, nous l’écrivons sur une feuille et ils la transcrivent.

Il y a quelques mois, nous avons reçu la visite des 1re année. Les grands ont lu leur première histoire de quelques phrases à mes élèves. Après l’activité, ma collègue de 1re a avoué aux élèves que nous avions une auteure dans la classe (elle parlait de moi – mon livre n’était pas sorti) et que tout ça avait commencé à l’école, à leur âge… À ce moment, je crois que j’ai dit à mes maternelles qu’un jour, nous écrirons une histoire ensemble. Quoi qu’il en soit, certains ne l’ont pas oublié.

Même si je ne travaille qu’un jour par semaine dans cette classe, j’aime fonctionner par thématique, indépendamment du thème travaillé par ma collègue. Ces jours-ci, nous travaillons sur le thème des dragons. Lorsque nous avons fait la carte d’exploration (ce que nous savons, ce que nous voulons apprendre), mes élèves ont entre autres dit qu’ils aimeraient apprendre à dessiner des dragons et écrire une histoire de dragon.



Pendant une semaine, Michèle et moi avons lu les albums de la série Pinoche, créée par Nancy Montour. Les enfants adorent ce gros dragon gourmand. Nous nous sommes pratiqués à dessiner Pinoche et lors d’une causerie, nous avons discuté de notre histoire de Pinoche préférée (et par le fait même, des caractéristiques du personnage). Les élèves devaient réfléchir à propos d’une autre aventure pour ce dragon.

C’est cette semaine que nous avons écrit et illustré notre livre collectif. Les élèves étaient installés sur le tapis devant un chevalet. J’ai dessiné une montagne sur une grande feuille (plutôt un triangle). Une histoire a un début, un milieu et une fin. Je leur ai résumé un Pinoche en à peu près trois phrases. On a observé le problème qu’a notre dragon. Ensuite, je leur ai demandé quel serait le problème de Pinoche dans notre livre. Quelques élèves voulaient qu’il ait une amoureuse. À partir de notre montagne, les élèves ont décidé que Pinoche serait triste, car il est seul. Il va manger beaucoup. Tout à coup, il va foncer dans une dragonne. Il va « vécu heureux avec son amoureuse ». Il restait maintenant à écrire notre histoire… avec 17 têtes qui ont toutes de bonnes idées.

Avant de commencer, j’ai insisté sur le fait qu’on ne choisira pas TOUTES les idées, même si elles sont bonnes. Qu’un auteur ne garde pas toutes ses idées, mais qu’il peut les utiliser pour une autre histoire. Dans le feu de l’action de création collective, il arrive qu’un enfant se choque ou pleure, car on n’a pas écrit « sa phrase ». (Heureusement, ce n’est pas arrivé!)

Ensuite, pour commencer l’histoire, nous avons lu la première page de 5 livres de Pinoche. Les apprentis-auteurs ont remarqué qu’elles commencent toutes de la même façon (avec quelques variantes): « Dans (le lieu), il y a très très longtemps, vivait … » (Qui? Où? Quand? Problème?)

Après délibération, nous avons décidé que l’histoire se déroulerait dans une forêt sombre. Je vous épargne tous les détails de cette création collective. Par moments, les enfants nous ont amenés dans différentes directions qui ne sont pas en lien avec l’intrigue de base. Mon rôle était de les ramener dans notre histoire en leur posant des questions (Ex. : Là, il vient de manger sa maison en bonbons. Pauvre Pinoche, il n'a plus de maison. Que va-t-il faire?). Souvent, je relisais notre manuscrit avant de leur poser une nouvelle question ou je leur demandais de m’épeler des mots. J’étais leur robot et ils étaient les auteurs. Le grand Jonathan était tout fier de m’épeler le mot Pinoche, sans faute, et de m’avouer : « Madame Julie, j’ai triché. J’ai regardé sur l’autre feuille, regarde, c’est écrit là. » Alors qu’une petite gazelle était pressée d’aller illustrer le livre (même s’il n’était pas terminé), Laurie a insisté : « Faut relire, parce que là, faut que ça continue, l’histoire! »


Les élèves, sans savoir ce qu’est l’intertextualité, insistaient pour en ajouter. Alors que Pinoche reconstruit sa maison, ils voulaient absolument qu’elle soit fabriquée en paille, en bois et en brique (comme les maisons des trois petits cochons – que nous avons lu et animé l’automne passé). Lorsqu’est venu le temps de voter pour le nom de la copine de Pinoche, Juliette a été choisi à l’unanimité (non, pas directement relié au personnage de Shakespeare, mais plutôt pour faire un clin d’œil à Juliette, la rate romantique ** de Carole Tremblay et Dominique Jolin, un de nos classiques de l’année).

Lorsque j’ai recopié le texte à l’ordinateur, j’ai fait en sorte que chaque élève ait une page à illustrer. Étant donné que chacun aura son exemplaire (et que les photocopies en couleurs, c’est trop dispendieux), j’ai demandé à mes cocos de tracer le dessin au crayon noir. Pour ce qui est de la couleur, ils l’ajouteront plus tard. Donc, en plus d’avoir créé un livre à partir d’un personnage existant, nous avons créé un album à colorier.

Mon rôle : les guider, simplement, et m'assurer que même les plus timides contribuent à cette création. J’ai hésité à propos du temps des verbes, mais j’ai finalement décidé d’écrire l’histoire au présent (sauf pour la première page, qui est au passé).

La semaine prochaine, chaque élève coloriera sa page pour l’exemplaire qui sera disponible à la bibliothèque de l’école. De plus, nous écrirons à Nancy Montour, l’auteure de ce cher Pinoche.

La série Pinoche le dragon
Auteure: Nancy Montour
Illustrateur: Benoît Laverdière
Collection: Raton laveur
Édition: Bayard Canada livres


** Juliette, la rate romantique est l'album idéal à exploiter pour une création collective à la St-Valentin.



4 commentaires:

  1. Très bonne idée de faire illustrer l'album en contour seulement. Je retiens cela!

    J'ai déjà fait des livres en couleurs que je numérisais. J'avais remis un cédérom à chaque enfant à la fin de l'année avec nos histoires collectives.

    Ju Rat!

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  2. @Ju Rat:

    Bonne idée aussi de numériser l'histoire en couleurs. Quand j'ai mon groupe à temps plein, je fais un cédérom de photos et vidéos, mais je n'avais pas pensé à numériser notre création collective. Je garde l'idée... :)

    Ju Pel

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  3. C'est fameux, Julie, encore une fois! Bravo!
    Tu es une enseignante exceptionnelle. Monsieur Legault te garderait, c'est sûr, avec une belle augmentation de salaire:-)
    Sans blague, vraiment: Bravo!
    Marie

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  4. Bien d'accord avec Marie. J'aimerais ça être une élève dans ta classe!!!

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